D�après l�article publié dans L�Éducateur, 57è année, octobre 1984, PP. 25-28

EVALUATION ET AUTONOMIE

Quelques problèmes soulevés par l�auto-évaluation et la pratique autocorrective en mathématique

Jean-Claude Régnier

Université Lumière Lyon2 - Lyon France

regnierj@univ-lyon2.fr

http://jean-claude.regnier.pagesperso-orange.fr/index.htm

 

Compte rendu de recherches en didactique des mathématiques ayant conduit à un D.E.A. et une thèse de 3e cycle à l�Université Louis Pasteur de Strasbourg

[ secrétariat IREM, 10 rue du Général Zimmer, 67000 Strasbourg]

 

I. Avant que l�aventure ne commence ...

Il convient, avant de parler des travaux proprement dits, de situer le chemin suivi. En effet pourquoi s�intéresser à l�autocorrection en mathématique plutôt qu�au comportement affectif de la paramécie ?

Mon histoire personnelle m�a conduit à m�intéresser très tôt au domaine de l�éducation et de l�enseignement. Je fus donc sensibilisé aux problèmes pédagogiques et didactiques. L�approche traditionnelle me parut rapidement ne pas correspondre tout à fait à des aspirations plus ou moins explicites. Sans peut-être la rejeter d�emblée et en bloc, je me trouvai attiré par les idées nouvelles et les pratiques correspondantes. Le hasard d�une exposition me fit rencontrer le mouvement Freinet. J�étais encore étudiant en licence de mathématiques. Dès ce moment, je fréquentai assidûment les réunions, les rencontres, et les stages de l�I.C.E.M.

Ainsi j�abordai mon premier poste déjà tout imprégné de beaucoup d�idées sur le plan pédagogique.

"  Il ne restait plus qu�à passer à la pratique ! " Ce que j�essayai de faire avec toute mon énergie.

Toutefois il m�apparut très vite la nécessité de prendre du recul par rapport à cette pratique quotidienne et les tentatives d�innovation. Il n�était pas question de se contenter d�opinions. J�avais besoin de les confronter en m�appuyant sur une démarche expérimentale rigoureuse. Pour moi, l�objectif était de faire fonctionner les méthodes et les techniques de la pédagogie Freinet dans les classes du second cycle de lycée, dans la discipline "mathématique". La chose n�était pas facile : les références, peu nombreuses : l�isolement, le lot quotidien ; la matière, un obstacle particulier de par la perception sociale de celle-ci. Il ne suffisait pas non plus de rencontrer d�autres collègues pour démarrer ; Il aurait fallu pouvoir travailler avec des collègues visant la même perspective dans des conditions similaires. Autant dire... c�était beaucoup demander ! Cela me décida l�année suivante à rencontrer le secteur universitaire de recherche en didactique des mathématiques.

L�I.C.E.M. est un immense réservoir d�idées, un bouillonnement très riche mais il ne pouvait m�apporter à lui seul, cette formation à la recherche. On n�y trouve pas toujours ce souci (quand il n�y a pas rejet, sur la base de l�opposition entre les praticiens et les théoriciens-coupés-de-toute-réalité-quotidienne) de recourir à une méthode expérimentale rigoureuse. A mon avis, l�I.C.E.M. gagnerait à progresser dans cette voie à condition naturellement que cette évolution ne s�opère pas au détriment de la confrontation aux faits de la pratique quotidienne. Il me semble que nous prendrions un risque bien grand en assimilant toute tentative de pratique dite "non traditionnelle" à la mise en �uvre d�une recherche (au sens scientifique). Nous nous exposerions à produire des erreurs de la même nature que celles que nous imputons à la pratique dite " traditionnelle ". Par ailleurs, je dois préciser que je rencontrai alors à l�université des gens acceptant de m�aider et de me guider tout en respectant mes choix (par exemple : volonté de suivre la ligne pédagogique du mouvement Freinet).

Ainsi je me suis mis à travailler dans trois lieux :

- la classe (et l�établissement)

- l�I.C.E.M.

- l�université : secteur " didactique des mathématiques " (Nancy-Strasbourg).

Pourquoi le secteur " didactique des mathématiques " plutôt que le secteur " sciences de l�éducation ",... parce qu�il se centrait sur les mathématiques. Et c�est là que se situaient en premier lieu mes préoccupations.

Si on observe la fréquentation du mouvement Freinet, ses publications, il apparaît une plus forte tendance vers les domaines " littéraires " et " artistiques " que vers le domaine " scientifique ".

Pour ma part, la problématique aurait pu être ainsi formulée :

Posée de cette manière, on entrevoit difficilement l�étude. La problématique est trop vaste et complexe, les variables trop nombreuses pour être rendus contrôlables. Il convenait donc de réaliser des réductions, restrictions, de sérier, de trier afin d�aboutir à l�explicitation de variables pertinents et contrôlables. Parmi les questions " concrètes " qui se posaient dans la pratique quotidienne de la classe, il y avait celles qui portaient sur le thème de l�autocorrection. Le bien-fondé de la pratique autocorrective était affirmé mais qu�en était-il en fait ? Et voilà l�aventure qui commençait !

 

II. Champ didactique & Champ pédagogique.

Ce découpage peut paraître a priori artificiel et difficilement définissable. Toutefois il semble avoir un intérêt en permettant l�apport de deux points de vue. Comment pourrais-je en préciser les contours sans polémiquer ni entrer dans une discussion qui n�aboutirait pas nécessairement ?

En m�appuyant sur les propos de Guy Brousseau (Bordeaux), tenus dans un texte intitulé "Petit panorama de la didactique des mathématiques" (mai 1982), je dirais que la didactique des mathématiques est "l�étude des phénomènes d'enseignement qui sont spécifiques de la connaissance enseignée (les maths) sans être réductible au domaine du savoir auquel elle appartient". La pédagogie, elle, engloberait des phénomènes plus généraux tels que l�organisation de la classe etc. La didactique expérimentale offrirait donc une démarche rigoureuse de recherche en isolant certaines variables spécifiques (variables didactiques) sans pour autant oublier la globalité. J�ajouterai que le secteur "didactique des mathématiques" est constitué pour l�essentiel de chercheurs dont la formation de base est une formation en mathématiques (plus ou moins approfondie : allant de celle du professeur de mathématique du secondaire à celle de chercheur en mathématique). Ce sont pour la plupart des gens concernés par l�enseignement des mathématiques qui se penchent sur ces phénomènes. Enfin précisons que ce domaine de recherche spécifique est assez récent. Toutefois l�accumulation des travaux commence à en faire un domaine de connaissance.

 

III. L�aventure...

Les travaux menés peuvent se résumer sous les deux titres de publications :

" Élaboration d�un livret autocorrectif " [1980a]

" Étude didactique d�un test autocorrectif en trigonométrie " [1983a]

Ils se proposaient d�esquisser des éléments de réponses à une cascade de questions comme par exemple :

Naturellement, une fois de plus, malgré cette première réduction il n�est pas possible d�aborder exhaustivement les questions. Je vais donc exposer ce qu�il est permis de dire à l�étape actuelle du travail.

 

III.1. - cadre pédagogique

La notion d�autocorrection renvoie à une finalité, à savoir celle d�autonomie de l�individu. L�originalité de Freinet et du mouvement Freinet réside dans le fait de ne pas se contenter d�un discours sur l�autonomie mais de bien chercher activement les conditions favorables, au sein de la classe, au développement de l�autonomie. Ainsi tentons-nous d�offrir à l�enfant ou à l�adolescent la possibilité de s�exprimer et de rechercher librement, de coopérer, de communiquer au sein de la classe. Cela suppose aussi qu�on lui reconnaisse le droit au tâtonnement expérimental, le droit à l�erreur en cours d�apprentissage. Les techniques et les méthodes de la pédagogie Freinet visent à atteindre ces objectifs. Le maître continue à avoir un rôle spécifique. Si l�idée de tâtonnement expérimental paraît assez claire quand il y a production matérielle, celle-ci ne va pas sans soulever de questions dans le cas d�apprentissage de mathématiques. C�est pourquoi mes travaux actuels se centrent essentiellement sur la question du tâtonnement expérimental. Quel est le sens d�une théorie d�apprentissage fondée sur le tâtonnement expérimental opérant dans le domaine des mathématiques ?

Plus généralement, il en est de même pour l�idée d�autonomie. Un des objectifs de l�éducation mathématique est de développer l�autonomie de l�élève vis-à-vis du maître.

Voici une situation illustrant ce propos :

Quand un élève a soigneusement résolu un problème et qu�il s�est livré à un certain nombre de vérifications, il doit être en mesure de penser :

- je suis sûr d�avoir résolu le problème ou il y a quelque chose que cloche.

Il peut arriver que cette conviction soit incorrecte mais malgré tout l�élève s�investit pour défendre son point de vue. Il ne considère plus l�objection du maître comme venant d�un oracle. Je compléterai par une anecdote concernant Henri Lebesgue, enfant et élève de l�école primaire, extraite de "Message d�un mathématicien, H. Lebesgue" par Lucienne Félix.

Un jour, donc, le maître propose un problème ; Henri le fait et porte son résultat : "ce n�est pas ça recommence". L�enfant refait son calcul et trouve la même réponse : "mais non, fais attention !" Et là-dessus, le maître sort laissant les enfants au travail. Alors Henri se lève, va jusqu�au bureau et regarde le livre du maître où il décèle l�erreur. A la rentrée de l�instituteur, Henri s�écrie : "c�est le livre qui s�est trompé". Le "père" Flobert (l�instituteur) déclarait ensuite tout heureux "c�est le gosse qui avait raison !"

Ainsi pour nous, une bonne éducation mathématique se doit de viser au développement de l�attitude autocorrective et auto-évaluative chez l�individu, pour contribuer au développement de l�autonomie.

Je pense donc que le cadre d�une pédagogie de l�autonomie, telle que la pédagogie Freinet, se trouve être un bon cadre pédagogique pour la problématique en question. Dans cette perspective, mes classes constituaient un premier lieu pour mener les expériences nécessaires. Toutefois cela ne semblait pas suffisant, c�est pourquoi une part importante des expériences furent conduites au collège coopératif de la Ricamarie (42). Ce collège fonctionnait sur la base d�un projet pédagogique, soutenu par une équipe de collègues de l�O.C.C.E. Le cadre d�une pédagogie coopérative convenait donc tout aussi bien. Dans les deux cas, la population scolaire peut être aisément répertoriée sous le label : "peu favorisée".

 

III.2. - L�approche dans la perspective d�une étude didactique

Dans un premier temps, il s�agissait de préciser les notions d�autocontrôle-autocorrection-auto-évaluation et la structure d�un livret autocorrectif. Il convenait aussi d�aboutir à l�explicitation d�une méthodologie d�élaboration d�un livret autocorrectif. Il fallait enfin arriver à un type d�évaluation cohérent et conforme aux principes énoncés au départ. Cette partie relève déjà du champ de la didactique en ce sens qu�on est conduit, par exemple, à des analyses de contenus ou à des analyses d�erreurs. Dans un second temps, il s�agissait d�apporter des informations concernant les effets observables d�une pratique autocorrective ou les comportements observables d�un individu travaillant en pratique autocorrective. Enfin il convenait d�avoir des renseignements complémentaires au sujet de la structure du livret autocorrectif.

 

IV. Les expériences et les résultats observés

IV.1. Élaboration d�un livret autocorrectif

IV.1.1. - Autocontrôle - autocorrection - auto-évaluation : de quoi parle-t-on ?

L�autocontrôle concerne la démarche à laquelle un individu a recours afin de formuler un jugement absolu par lui-même, en se dégageant de la tutelle d�un maître.

L�autocorrection est la démarche qui amène l�individu à rectifier, à améliorer ou à renforcer son apprentissage, ou tout simplement à rectifier son résultat ou sa méthode par lui-même.

L�auto-évaluation constitue le troisième volet. Elle conduit l�individu à décider par lui-même de la formulation du jugement et de l�aptitude à adopter.

IV.1.2. - La problématique de l�outil autocorrectif

Pour cela, je me suis fixé sur un contenu banal et limité, à savoir celui des "équations du second degré". Ce sujet est au programme du second cycle et peut être exploré d�une façon suffisamment approfondie. J�ai réalisé un premier questionnaire qui a été soumis à une population d�environ 140 élèves de classes de seconde T1, réparties en cinq classes sur deux lycées. J�ai ensuite procédé à une analyse des réponses et des erreurs. Des raisons d�échecs furent mises en évidence. Elles furent utilisées dans la rédaction de la partie autocorrective  et de la partie auto-évaluative. J�ai tenté aussi de savoir de quelles précautions il convenait de s�entourer pour réduire le nombre de questions d�une fiche sans pour autant diminuer la signification de l�échec ou de la réussite. Enfin j�ai cherché à m�éloigner de la " notation traditionnelle " s�appuyant sur la simple comptabilisation du nombre des réussites en prenant en compte les réussites, les erreurs et les non-réponses. Distinction a été faite entre " échec par erreur " et " échec par non-réponse " en en différenciant la signification. Enfin il était utile d�adopter une pondération des questions qui ne gomme pas les différences observées.

 

IV.1.3. - L�évaluation R.E.N.

Cette évaluation a pour objectif de tenir compte des trois facteurs suivants :

Pour cela, en se basant sur la population de référence, on établit pour chaque question, une " note " d�erreur, en fonction de son taux d�erreur. L�absence de réponse est comptabilisée comme neutre.

D�un point de vue géométrico-mécanique, on peut imaginer un mobile ponctuel dans le plan repéré par (O, I, J) : réussite en abscisse et échec par erreur en ordonnée. Répondre à une question revient à faire avancer ce point horizontalement de gauche à droite d�une distance égale à la "note" de réussite, si la réponse est correcte. Si la réponse est incorrecte ; le point se déplace verticalement du bas vers le haut d�une distance égale à la note d�échec par erreur de la question en jeu. Le point ne bouge pas en cas de non-réponse. A la fin du questionnaire le point atteint une zone du plan caractéristique de la qualité de l�apprentissage. Le zonage du plan est obtenu à partir du comportement de la population expérimentale. Ainsi, la pratique de l�auto-évaluation ne se réalise plus de façon absolue mais relativement à un comportement observé dans des circonstances précises avec une population de référence.

IV.1.4. - Vers une méthodologie d�élaboration d�un livret autocorrectif

Tout le travail mené permet alors de proposer la méthodologie suivante pour l�élaboration d�un livret autocorrectif dans le respect des principes pédagogiques sous-jacents.

Forme générale d�un livret autocorrectif

Extrait de l'ouvrage [1983b] Évaluation et autonomie

Test de pré-requis ® test préliminaire ® Document autocorrectif ® Outil d�auto-évaluation ® Test final

Phase 1 :

Définir le contenu sur lequel porte le travail.

Expliciter les objectifs visés.

Expliciter les pré-requis c�est-à-dire les savoirs et savoir-faire nécessaires mais situés hors-champ didactique par rapport au domaine déterminé.

S'efforcer de rester dans un domaine bien circonscrit.

Phase 2 :

Élaborer le test des pré-requis.

Phase 3 :

Élaborer le test préliminaire.

Contraintes : éviter de dépasser 30 questions et envisager éventuellement plusieurs modalités.

Phase 4 :

Établir un protocole stipulant les conditions de passation des deux tests : celui des pré-requis et le test préliminaire (prévoir le cas des diverses modalités).

Phase 5 :

Établir un protocole de correction en vue du dépouillement (nécessaire en cas de travail réparti entre plusieurs personnes).

Prévoir les outils de recueillement des données.

Phase 6 :

Déterminer une population à laquelle seront soumis les tests (5 à 6 classes soit 150 à 200 élèves)

Prévoir de recueillir quelques informations la concernant afin de vérifier l�homogénéité ou d�autres facteurs.

Phase 7 :

Réaliser la passation.

Recueillir les informations.

Phase 8 :

Dépouiller le test des pré-requis et le test préliminaire :

- la correction est faite selon les trois modalités R.E.N.

- relever les erreurs (établir une typologie).

Phase 9 :

Calculer pour chaque question du test préliminaire, le taux de réussite et le taux d�erreur par rapport à la population totale (celle qui a passé le test).

Phase 10 :

Établir pour chaque question, le poids en réussite et le poids en erreur.

Phase 11 :

Établir une grille et calculer pour chaque individu, son score de réussite et son score en erreur ainsi que le nombre de questions auxquelles il n�a pas fourni de réponse.

Phase 12 :

Reporter la population, graphiquement dans un plan repéré par un repère (O, I, J). Chaque individu est représenté par un point de coordonnées (score de réussite ; score en erreur).

Phase 13 :

Observer le nuage de points et déterminer les zones établissant les niveaux de réussite en regroupant les individus proches par leurs résultats.

Phase 14 :

Rédiger la fiche " grille d�auto-évaluation ".

Phase 15 :

Analyser les erreurs et rédiger la partie "autocorrective" en tenant compte des erreurs les plus fréquentes.

Phase 16 :

Rédiger la forme finale du test préliminaire en tenant compte des erreurs les plus fréquentes.

Phase 17 :

Élaborer le test final analogue au test préliminaire.

Phase 18 :

Construire le livret autocorrectif en respectant la structure décrite au début :

- test des pré-requis

- test préliminaire

- document autocorrectif

- grille d�auto-évaluation

- test final.

IV.2. - Étude didactique d�un test autocorrectif en trigonométrie

Les travaux menés dans ce cadre conduisent à apporter une réponse aux deux questions suivantes :

- les effets observables d�une pratique autocorrective

- la forme du livret autocorrectif.

D�autres questions sont encore abordées mais je ne rendrai point compte ici afin de ne pas alourdir exagérément cet article. Cette fois, le contenu mathématique sur lequel les élèves ont travaillé, était celui de la géométrie élémentaire visée par le programme des classes de troisième de collège. La population de référence a été constituée par les élèves des classes de troisième du C.E.S. de la Ricamarie (42), et ceux des classes de seconde dont j�avais la charge au lycée d Montceau-les-Mines (71). Les expériences se sont déroulées durant les années scolaires 1980-1981 et 1981-1982.

 

IV.2.1. - Première expérience

Elle s�est déroulée en cinq temps pour les classes de 3e. Je laisse de côté ce qui a été fait en classe de seconde et qui a servi de point de comparaison.

Étape n� 1 :

Apprentissage des notions trigonométriques (4 semaines environ)

Étape n� 2 :

La population complète passe un test préliminaire qui officiellement ne comptera pas pour les professeurs.

Étape n� 3 :

Toutes les copies ont été ramassées mais on ne fais pas porter les traces de la correction que pour la moitié de la population (les deux sous-populations ayant été établies préalablement par tirage au sort suivi de quelques aménagements fondés sur la connaissance des élèves par les professeurs). Étalonnage du test préliminaire. Mise au point du document autocorrectif.

Étape n� 4 : (une semaine après l�étape n�2)

- Une sous-population reçoit une correction traditionnelle au tableau, et oralement par le professeur.

- l�autre sous-population reçoit le document autocorrectif et chacun se doit d�effectuer la correction par lui-même.

Au cours de chaque séance, nombre d�observations, d�enregistrements sur bande magnétique ou vidéo sont faits. Des questionnaires divers tentent de recueillir un maximum d�informations de la part des élèves. Ici il n�en sera pas question.

Étape n� 5 : (une semaine après l�étape n�4)

La population complète passe un test final comparable au test préliminaire.

 

IV.2.2. � " Attitude " et " compétence "

Pour interpréter les résultats obtenus il fut nécessaire de dégager deux notions pédagogiques : celle d�attitude, et celle de compétence. En schématisant cela peut se réduire à la situation suivante :

attitude

je réponds

je ne réponds pas

compétence

je sais

je ne sais pas

C�est le cas auquel est confronté un individu placé devant une question écrite. La pratique pédagogique traditionnelle ne postule que deux modalités : la réussite, et son contraire : l�échec. Ainsi tout élève soumis à un contrôle aura intérêt à répondre puisque l�absence de réponse est jugée comme une erreur. Il se donne de cette façon, une certaine chance de fournir une réponse exacte, un peu par hasard. Cette démarche me paraît pour le moins critiquable :

- risque de sous-compréhension

- mise en contradiction avec la finalité de "former des individus à un esprit scientifique" au sens de cet esprit consistant à ne fournir un résultat qu�après avoir acquis une certitude. Dans cette perspective on se retrouve dans l�un des deux cas : réussite ; échec par erreur (en toute quiétude !).

Le choix du codage R.E.N. à trois modalités :

Réussite

R

Échec par erreur

E

Échec par non-réponse

N

s�avère être un point fondamental dans le cadre de la pratique "autocorrective"". Il implique : la prise en compte des erreurs, la différenciation "attitude" et "compétence". Je ne rentrerai pas plus dans les discussions nécessaires et j�invite le lecteur intéressé à lire le rapport même.

 IV.2.3. Effet de la pratique autocorrective sur l�attitude

L�analyse des résultats fait apparaître l�observation suivante

La pratique autocorrective provoque chez les individus, un changement d�attitude, sans perte sur le plan de la compétence. Un gain sans perte !

En effet la comparaison des résultats des deux échantillons par rapport aux deux tests montre qu�aucune différence n�apparaît sur le test préliminaire alors qu�il y en a une, significative, sur le test final. Les tableaux ci-dessous illustrent le propos.

Test préliminaire

échantillons

R

E

N

 

A

217

175

238

630

T

216

176

238

630

 

433

351

476

 

Test Final

échantillon

R

E

N

 

A

89

86

77

252

T

91

109

52

252

 

180

195

129

 

A : échantillon de 21 élèves extrait de la population et ayant travaillé en "autocorrection".

T : échantillon de 21 élèves extrait de la population et ayant travaillé en "correction traditionnelle".

 

IV.2.4. - deuxième expérience :

Il s�effectue là une espèce de glissement de perspective. En effet je cherche à m�intéresser au fait qu�il n�y ait pas eu de modification entre les deux groupes quant à la modalité "compétence". L�idée est de voir s�il n�y a pas là un rôle joué par le moment de la donnée de la correction sous les deux formes. L�hypothèse directrice formulée est alors la suivante : les élèves s�étaient stabilisés autour de réponses fournies au test préliminaire et le laps de temps écoulé avant le test final, n�avais pas permis une modification suffisante de la compétence, quelle que soit la méthode utilisée pour assurer la correction. La seconde expérience a eu pour but de mettre en jeu la variable "place de la correction" dans une démarche autocorrective.

L�outil est celui élaboré à la suite de la première expérience. Il prend deux formes :

La population est divisée en deux sous-populations homogènes par rapport à un test de pré-requis. Pour la classe de troisième, l�expérience se déroule selon les étapes suivantes :

 

IV.2.5. - Effet de la pratique autocorrective sur la compétence.

Sans rentrer dans le détail de l�analyse il est possible de rapporter l�observation suivante :

Au vu des résultats la modalité Ao pourrait être la plus profitable à condition que son emploi soit bien contrôlé sinon la modalité Bo qui présente moins de risque à l�emploi lui sera profitable. Ceci justifie l�ordre fourni dans la constitution du livret autocorrectif. Le risque encouru dans la modalité Ao est que l�élève peut être tenté de regarder la réponse sans s�être efforcé de chercher suffisamment. Cette forme met davantage en cause l�influence du professeur que Bo.

 

V. Et l�aventure pourrait continuer

J�ose espérer que malgré la concision, l�élimination de plusieurs aspects pris en compte dans la recherche, cet article restera compréhensible et permettra au lecteur de saisir l�ensemble de la problématique traitée et par-là même il pourra m�apporter une critique fructueuse. Il va de soi non plus que je ne suis pas entré dans une description détaillée de la méthodologie employée. Je renvoie pour cela aux rapports de recherche cités en bibliographie. Il est bien clair que tout ceci ne concrétise qu�une étape, et que bien des travaux et des expériences sont encore à faire. Je n�ai même pas épuisé le corpus des données recueillies. Il reste ainsi des tas d�informations à analyser afin de poursuivre l�aventure.